Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 4, 1846.djvu/1061

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vous rendiez tous à ce que j’établis à cet égard, qui est de donner cinquante toises par bataillon et trente par escadron, ainsi que je l’ai ci-devant réglé, ce qui fait dix toises pour la distance d’un bataillon à l’autre, et six d’un escadron à l’autre. Si même vous avez assez de troupes pour ne laisser aucune distance entre les bataillons et les escadrons, en sorte qu’ils se touchent quand il faudra charger, ne manquez pas de l’observer ainsi ; car s’il est dangereux, quand les bataillons et escadrons se chargent, de s’ouvrir et de faire un vide, il en est de même, à plus forte raison, dans l’étendue de toute une ligne, parce que si celle de l’ennemi est pleine, les troupes qui se trouvent vis-à-vis les vides de la vôtre vous prennent par les flancs, tandis que vous êtes encore attaqué par le front.

Si par hasard votre première ligne étant pleine en marchant à l’ennemi, quelques bataillons et escadrons se trouvent trop pressés en des endroits, c’est aux officiers généraux ou même aux brigadiers d’ordonner à un tel bataillon ou escadron d’arrêter et de se mettre derrière en interligne, pour que les autres s’élargissent.

Pour ce qui est de la seconde ligne, quoiqu’elle soit pleine, s’il arrivait que des troupes de première ligne fussent renversées, et qu’il fallût leur faire passage pour se réformer derrière, pour lors il est facile d’une ligne pleine d’en faire deux tant pleines que vides. Chaque brigade d’infanterie est de six bataillons, et chacune de cavalerie de huit escadrons. Ceux qui commandent n’ont qu’à ordonner de faire marcher en avant à cinquante toises quatre escadrons et trois bataillons de chaque brigade, le second, le quatrième et le sixième bataillon ; le second, le quatrième, le sixième et le huitième escadron, en commençant à compter de la droite, excepté ceux des brigades qui ferment la gauche des lignes, où l’on prendra le second en venant de la gauche. Pour lors, si des troupes de la première ont plié, elles ont un passage pour se rallier derrière la seconde ligne, tandis que nos bataillons et escadrons, qui sont avancés, arrêtent la poursuite des ennemis, et même les renversent, s’ils ne sont pas en assez grand nombre et en bon ordre.

Quand je marque que la distance de la première ligne à la seconde doit être de cent cinquante toises, c’est que c’est celle qui convient le mieux pour pouvoir sans confusion exécuter tous les différens mouvemens des troupes d’une ligne à l’autre, suivant que l’exigent les différentes occasions. De plus, quand les premières lignes se chargent, la seconde, par ce moyen, n’est pas sous leur feu ; et comme la seconde voit tout ce qui se passe à la première, elle a toujours le temps de s’en rapprocher, ou tout entière, ou en partie seulement, au gré de celui qui la commande. Au reste, ces distances ne peuvent se donner qu’à vue, et souvent même le terrain ne permet pas d’en donner seulement cent toises ; il en est de même par rapport aux distances des interlignes, et plusieurs autres ; mais on ne peut être trop juste pour celles qu’on doit mettre entre les bataillons et escadrons en ligne.

S’attacher surtout à bien faire marcher les troupes de front quand ce sera pour attaquer l’ennemi ; quand même les troupes seraient, à cet égard, dans un grand usage, et qu’elles n’auraient à marcher que dans une plaine unie, où il ne se rencontrerait aucune occasion de rompre la ligne, la chose serait