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HISTOIRE DE LA COMMUNE DE 1871

qui croyait malgré tout à l’intervention américaine, alla aux avant-postes allemands porter une lettre pour l’ambassadeur Washburne, plus hostile que jamais à la cause de la Commune, étant l’ami de Darboy. Arnold fut reçu assez durement et renvoyé avec la promesse vague que son billet serait transmis.

Plusieurs bataillons versaillais, parvenus par la route stratégique à la rue de Crimée, sont arrêtés rue de Bellevue. De la place du Marché, trois canons unissent leur feu à celui de la place des Fêtes pour protéger les buttes Chaumont. Cinq artilleurs seulement servirent ces pièces toute la journée, n’ayant besoin ni d’ordre ni de chef. À quatre heures, les canons des buttes se taisent faute de munitions ; leurs servants vont rejoindre les tirailleurs des rues Ménadier, Fessart et des Annelets.

À cinq heures. Ferré amène rue Haxo les lignards de la caserne du Prince-Eugène, transférés depuis le mercredi à la petite Roquette qui vient d’être évacuée ainsi que la grande. La foule les regarde sans menace ; le peuple est sans haine pour le soldat, peuple comme lui. Ils sont casernés dans l’église de Belleville. Leur arrivée produit une diversion fatale. On accourt sur leur passage et la place des Fêtes se dégarnit. Les Versaillais surviennent, l’occupent, et les derniers défenseurs des buttes se replient sur le faubourg du Temple et la rue de Paris.

Pendant que leur front cède, les fédérés sont attaqués par derrière. Depuis quatre heures de l’après-midi, les Versaillais assiègent le Père-Lachaise qui renferme deux cents fédérés à peine, toujours sans discipline, sans prévoyance ; les officiers n’ont pu parvenir à faire créneler les murs. Les Versaillais abordent de tous les côtés à la fois cette enceinte redoutée et l’artillerie du bastion fouille l’intérieur. Les pièces de la Commune n’ont presque plus de munitions depuis l’après-midi. À six heures, les Versaillais n’osant, malgré leur nombre, tenter l’escalade, canonnent la grande porte du cimetière. Elle cède promptement malgré la barricade qui l’étaye. Abrités derrière les tombes, les fédérés disputent leur refuge. Il y a dans les caveaux des combats à l’arme blanche. Les hommes ennemis