Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/112

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rien à ce mélange de culture intellectuelle, de lectures avides, de science ardente, d’érudition virile, et de mouvemens prime-sautiers, effarés, convulsifs parfois, comme ceux de la lionne pressentant dans chaque feuille qui remue un danger pour ses petits. — Les polonaises qui traversaient Dresde et Vienne, Carlsbad et Ems, pour chercher à Paris une Espérance secrète, à Rome une Foi encourageante, ne rencontrant la Charité nulle part, n’arrivaient ni à Londres, ni à Madrid. Elles ne songeaient point à trouver une sympathie de cœur sur les bords de la Tamise, ni une aide possible parmi les descendans du Cid ! Les anglais étaient trop froids, les espagnols trop loin.

Les poètes, les littérateurs de la France, furent les seuls à s’apercevoir que dans le cœur des polonaises, il existait un monde différent de celui qui vit et se meut dans le cœur des autres femmes. Ils ne surent pas deviner sa palingénésie ; ils ne comprirent pas que si, dans ce chœur féminin varié d’âge et de beauté, on croyait parfois retrouver les mystérieuses attractions de l’odalisque, c’est qu’elles étaient là comme une parure acquise sur un champ de bataille ; si l’on pensait y entrevoir une silhouette de walkyrie, c’est qu’elle se dégageait des vapeurs de sang qui depuis un siècle planaient sur la patrie ! Par ainsi, ces poètes et ces littérateurs ne saisirent point la dernière formule de cet idéal dans sa parfaite simplicité. Ils ne se figurèrent point une nation de vaincus qui, enchaînée et foulée aux pieds,