Page:Liszt - F. Chopin, 1879.djvu/270

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facilement contagieuses. Aussi, le voyant si languissant à son départ, ses amis osaient à peine espérer son retour. Et pourtant ! Quoiqu’il fît une longue et douloureuse maladie à l’île de Majorque où il resta six mois, à partir d’un bel automne jusqu’à un printemps splendide, sa santé s’y rétablit assez pour paraître améliorée pendant plusieurs années.

Fut-ce le climat seul qui le rappela à la vie ? La vie ne le retint-elle point par son charme suprême ? Peut-être ne vécut-il que parce qu’il voulut vivre, car qui sait où s’arrêtent les droits de la volonté sur notre corps ? Qui sait quel arôme intérieur elle peut dégager pour le préserver de la décadence, quelles énergies elle peut insuffler aux organes atones ? Qui sait enfin, où finit l’empire de l’âme sur la matière ? Qui peut dire en combien notre imagination domine nos sens, double leurs facultés ou accélère leur éteignement, soit qu’elle ait étendu cet empire en l’exerçant longtemps et âprement, soit qu’elle en réunisse spontanément les forces oubliées pour les concentrer dans un moment unique ? Lorsque tous les prismes du soleil sont rassemblés sur le point culminant d’un cristal, ce fragile foyer n’allume-t-il pas une flamme de céleste origine ?

Tous les prismes du bonheur se rassemblèrent dans cette époque de la vie de Chopin. Est-il surprenant qu’ils aient rallumé sa vie et qu’elle brilla à cet instant de son plus vif éclat ? Cette solitude, entourée des flots bleus de la Méditerranée, ombragée de lauriers.