Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/103

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ne vous marrissiez de riens qu’il die, car vous savez qu’il est de haultes paroles et de sottes responces. Si vous prie pour vostre honneur que vous ne preignez point de debat avecques luy, et le dis féablement, comme je voulsisse dire à ma suer. » Maiz elle ne m’en voult croire, ains tença encore plus fort que devant, et lui dist qu’il ne valoit riens, et moult d’autres parolles. Et il respondist, comme fol, qu’il valoit mieux pour homme qu’elle ne faisoit pour femme. Et elle lui dist qu’il ne disoit mie voir, et creurent leurs paroles et surmontèrent tant que il deist que, s’elle feust saige, elle ne venist pas par nuit ès chambres aux hommes les baisier et accoler en leurs liz sans chandoille, et elle s’en cuida bien venger, et lui dist qu’il mentoit, et il luy dist que non faisoit et que tel et tel lui avoient veue. Si avoit là moult de genz, qui furent esmerveillez, qui riens ne sçavoient de ce, et si y ot pluisseurs qui dirent que ung bon taire lui vaulsist mieulx, et qu’elle s’estoit batue par son baston mesmes c’est-à-dire par sa langue et par son hatif parler. Et après celles parolles, elle ploura et dist qu’il l’avoit diffamée, et il ne demoura pas ainsi, car il l’assaillit arrière devant tous et estriva et tença tant que il luy dist encores qu’il y avoit veu pis, et dist paroles encores plus ordes et plus honteuses au deshonnour d’elle, que jamais ne luy chierroit pour secourre qu’elle face, et ainsy se ahontaga par son fol couraige et par sa haultesce de cuer.

Et pour ce ainsy a cy bon exemple comment nulle femme ne doit tencier ne estriver à fol, ne à folle, ne avecques gens qu’elle sache qui aient haultain couraige ; ainsi les doit l’en eschever, et, se l’en voit qu’ilz vueillent parler