Page:Livre du Chevalier de La Tour Landry.djvu/93

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congnoys des grans dames et autres qui sont moult courtoises et qui en ont moult de belles graces acquises de l’amour des grans et de petits ; se vous monstrés vostre courtoisie aux petits et aux petites, c’est de leur faire honneur et parler bel et doulcement avec eux et leurs estre de humbles responses ; ceulx vous porteront plus grant louange et plus grant renommée et plus grant bien que les grans. Car l’honneur et la courtoisie qui est portée aux grans n’est faicte que de leurs droiz, et que l’on leur doit faire. Mais celle qui est faite aux petits gentilz homms et aux petites gentils femmes et autres maindrez, telles honneurs et courtoisies viennent de franc et de doulx cuer, et li petiz à qui on la fait s’en tient pour honnouré, et lors il l’essauce par tout, en donne loz et gloire à cellui ou à celle qui lui a fait honneur, et ainsi des petis à qui l’on fait courtoisie et honneur vient le grant loz et la bonne renommée, et se croist de jour en jour. Dont il avint que je estoye en une bien grant compaignie de chevaliers et de grans dames, si osta une grant dame son chapperon et se humilia encontre un taillandier. Si y avoit un chevalier qui dist : « Madame, vous avez osté vostre chapperon contre un taillandier », et la dame respondit que amoit mieux à l’avoir osté contre luy que à l’avoir laissié contre un gentil homme. Si fut tenu à grant bien de tous pour la bonne dame.