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JACK LONDON

roula sur le plancher. Le tronc eut un léger recul. Puis tout mouvement cessa.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

Loup Larsen continue à vivre.

C’est Maud qui, chaque jour, avec un admirable dévouement, lui demande ce qui lui est nécessaire et, notamment, ce qu’il souhaite manger.

Elle pose ses doigts sur les lèvres, qui se remuent légèrement. Et, de leur mouvement, elle déduit si c’est un oui ou un non.

— Voulez-vous du bœuf ?

— …

— Non ? Voulez-vous du bouillon de bœuf ?

— …

— Oui ? C’est entendu… Humphrey, il désire du bouillon de bœuf.

Ce soir, ses yeux se remplirent de larmes. Puis, se laissant aller dans mes bras, elle murmura :

— Oh ! Humphrey, quand tout cela finira-t-il ? Je suis à bout de forces. Je n’en peux plus…

Elle posa la tête contre mon épaule ; je sentis sa frêle silhouette secouée par les sanglots. Entre mes bras, elle était légère comme une plume.

« Elle ne va pas tenir le coup », songeai-je.

Je la consolai et elle reprit bientôt le dessus.

— Je devrais avoir honte. (Puis elle ajouta avec un sourire étrange et adorable :) Mais je ne suis qu’un petit bout de femme.

Je ressentis comme une décharge électrique ; c’était ainsi que je l’appelais dans mon for intérieur.

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