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CHAPITRE PREMIER

LES REPASSEUSES


— Tu m’entends, Saxonne ? Il faut venir. Qu’importe que ce soient des maçons ? J’y rencontrerai des amis très comme il faut, et toi aussi. L’harmonie Al Vista sera là, et tu sais qu’elle joue divinement. D’ailleurs tu raffoles de la danse.

À vingt pas, l’exclamation d’une femme âgée interrompit les exhortations de la jeune fille. Elle leur tournait le dos, un dos branlant, bombé, déformé, et ce dos commençait à se soulever convulsivement.

— Mon Dieu ! criait la vieille, oh ! mon Dieu !

Comme un animal pris au piège, elle lançait des regards effarés d’un bout à l’autre de la grande salle blanchie au lait de chaux, qui semblait vibrer de chaleur et qu’embuait la vapeur surgie du linge humide sous les nombreux fers des repasseuses. Ses voisines, qui toutes balançaient leurs carreaux avec une précipitation bien rythmée, lui jetèrent de rapides coups d’œil, et le taux d’efficacité du travail dut pâtir d’une vingtaine de mouvements inachevés ou maladroits. Parmi les repasseuses de fin, qui travaillaient aux pièces, le cri de la vieille avait fait passer le frisson angoissant d’une perte d’argent possible.

D’un visible effort elle se ressaisit en même temps