Page:London - Le rêve de Debs, trad Postif, paru dans Regards du 7 au 28 mai 1936.djvu/50

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je me traînai vers la ville.

En entrant dans la ville, je me souvins de la famille ouvrière où j’avais troqué ma cruche d’argent, et la faim m’attira dans cette direction. Le crépuscule tombait lorsque j’y arrivai. Je fis le tour par l’allée et grimpai les marches de derrière sur lesquelles je tombai en faiblesse. Je réussis cependant, en allongeant ma béquille, à frapper à la porte.

Puis je dus m’évanouir, car je repris mes sens dans la cuisine. On m’avait mouillé le visage, et quelqu’un me versait du whisky dans la gorge. Je toussai et balbutiai, essayant d’expliquer que je n’avais plus de cruches d’argent, mais qu’ils ne perdraient rien par la suite s’ils voulaient seulement me donner quelque chose à manger. La ménagère m’interrompit :

— Mais, mon pauvre homme, vous ne savez donc pas la nouvelle ? La fin de la grève a été déclarée cet après-midi. Naturellement, nous allons vous restaurer.

Elle s’affaira, ouvrit une boîte de lard et se prépara à le faire frire.

— Donnez-m’en un peu tel quel, s’il vous plaît, demandai-je, et je me mis à dévorer du lard cru sur une tranche de pain, tandis que le mari m’expliquait que les demandes du Syndicat avaient été accordées. Le télégraphe recommençait à fonctionner depuis le début de l’après-midi, et partout dans le pays les associations patronales avaient cédé. Il ne restait plus