Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/101

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

succès peuvent-ils toucher un homme qui a renoncé même à son nom ? Certes, frère Enthyme, ni frère Amphiloque, ne visent pas à la gloire, et jamais vœux plus humbles ne furent plus religieusement accomplis. Et le novice, qui veille aux soins domestiques près de ses deux compagnons, là bas, à l’extrémité de la France, devers les Alpes ou les Pyrénées, et le supérieur qui tient ici dans sa main tous les fils de la communauté, qui commande une milice organisée par toute la France, tous portent un manteau de même laine, un chapeau de même feutre, et se saluent mon frère.

Le plus rude assaut qui peut-être ait été livré jamais à la modestie de l’institut, la proposition de la croix d’honneur faite au père Anaclet par le Ministre de l’instruction publique[1], n’a pas même ébranlé sa résolution. Et cependant, pour répondre aux dispositions bienveillantes d’un ministre dont on avait besoin, pour donner plus d’éclat à l’institut, presque partout menacé, il semble que le chef de la doctrine chrétienne eût pu, sans orgueil, la laisser décorer dans sa personne d’un honneur qui ne s’adressait pas à lui-même ; il le refusa : Ce n’était point, disait-il, l’esprit de l’humble institution fondée par le vénérable abbé de Lasalle.

Nous ne saurions donc nous étonner de la faveur soutenue dont les écoles des frères ont joui sous tous les régimes ; une instruction suffisante, une direction religieuse dans l’éducation qui manque à beaucoup d’autres écoles, justifient assez les familles qui leur confient ce qu’elles ont de plus cher. Toutefois, nous ne nous dissimulons pas que, dans la persécution dont se plaignent les frères, ils ont souvent donné beau jeu à leurs ennemis, et qu’ils ont créé à leurs protecteurs mêmes des embarras peut-être insurmontables.

Toute administration est jalouse de ses droits, et n’aime guère à les partager : d’ailleurs, celle des frères

  1. M. Guizot, en 1833