Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/117

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Il est vrai qu’il faudrait alors choisir ces bonnes sœurs moins ignorantes qu’elles ne le sont d’ordinaire (280) ; car, si quelques maisons privilégiées, celle de la Providence à Langres (281), de Portieux (282) et de Ribeauvillé dans les Vosges fournissent aux communes certaines institutrices dont l’enseignement porte des fruits, il ne faut guère demander en général à ces pauvres filles, comme à la béate du Cantal que des dentelles et des prières (283). Les exemples contraires sont si rares (284) que, malgré les inconvénients d’un pareil mélange, les familles préfèrent ordinairement envoyer leurs filles partager avec les garçons les leçons de l’instituteur (285). Nous avons même noté une école de filles à la tête de laquelle on a placé de préférence un maître (286).

Cependant les dangers de cette sécurité sont réels (287). Il ne faut rien exagérer, et nous croyons bien que dans les campagnes, l’habitude pour les filles et les garçons d’être continuellement occupés ensemble à des travaux communs, de partager les mêmes jeux, loin de toute espèce de surveillance, le retard des tempéraments, moins précoces que dans les villes (288), diminuent beaucoup les inconvénients du mélange des sexes dans les écoles (289). Aussi, partout où le local permet de pratiquer la sage précaution imposée par le conseil royal de l’instruction publique (290), il y aurait plutôt avantage à ne point priver les filles du seul moyen d’instruction qu’elles puissent espérer (291), si l’on n’avait pas souvent plus à craindre du maître que des écoliers. Malheureusement les scandales de ce genre sont si communs, et les effets en sont toujours si funestes à la tranquillité des familles, qu’on ne saurait trop se hâter d’organiser partout des écoles spéciales de filles pour remplacer un genre d’instruction pire que l’ignorance (292).