Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/56

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riche (148) ; il lui faut trop de bras. Si elle y est florissante, l’aisance est une bonne nourrice pour les écoles (149). Ces contradictions montrent assez qu’on s’est attaché là à des apparences extérieures beaucoup moins vitales qu’on ne le suppose dans la question. Je croirais volontiers que ce n’est, ni dans un peu plus de prospérité, ni dans un degré de gêne plus pénible, que se décide le goût ou l’insensibilité des gens de la campagne pour l’instruction (150). En cela, comme en toute chose l’homme est un animal imitateur, et l’exemple est aussi nécessaire pour le progrès du bien qu’il est contagieux pour la propagande du mal.

Aussi, en règle générale, tous les moyens de communication entre les hommes tournent au profit de l’instruction (151). Le Briançonnais, en revenant la besace chargée du petit pécule qu’il a gagné dans son enseignement de passage, réunit ses enfants autour de l’âtre, et leur apprend les secrets du métier. Il fait de sa famille une pépinière de maîtres ambulants comme lui (152). Le Limousin a vu le monde ; il a appris à Paris toute la distance qui sépare dans son état le goujat ignorant du tailleur de pierres qui sait lire, écrire, calculer, et même qui possède quelques notions de dessin élémentaire. Aussi, ne croit-il pas faire un mauvais marché en échangeant quelques pièces du petit trésor qu’il rapporte à sa famille contre une croix de Jésus qu’il met entre les mains de son enfant. Ici, toute contradiction disparaît ; les avis sont uniformes, non pas sur le résultat moral des émigrations pour la vie de famille, etc., ce qui n’est pas la question, mais pour les heureux effets qu’elles ne manquent jamais de produire, quant à l’instruction primaire (153). Les grandes routes ne servent pas seulement au transport des denrées ; les idées y circulent aussi, et les populations riveraines en arrêtent toujours quelqu’une au passage, dont elles font