Page:Lorain - Tableau de l’instruction primaire en France.djvu/98

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pour eux ; ils ont traversé, depuis 1830, bien des jours mauvais : eux aussi, ils ont eu leurs émeutes à vaincre, et la lutte dure encore. Si la restauration les a puissamment secondés, aux dépens des écoles rivales, ils ont, depuis ce temps, payé bien cher la protection politique dont ils ont alors profité ; ils en sont victimes aujourd’hui. Toutes les grâces leur étaient prodiguées ; les conseils municipaux leur refusent maintenant les plus légitimes secours (268). Eh bien ! au milieu de toutes ces disgrâces, ils résistent, ils prospèrent, et, ce qu’on aurait peine à croire, c’est que, depuis 1830, le nombre de leurs écoles, de persécution en persécution, est allé toujours croissant[1].

Quand donc bannira-t-on en France la politique de l’instruction primaire ? Savons-nous si mal faire le bien, que ce bien même puisse devenir un mal ? Quand nous soutenions autrefois l’établissement de l’enseignement mutuel, malgré les répugnances du gouvernement, serait-il vrai que ce n’était point seulement pour nous un moyen de propager avec avantage l’instruction parmi le peuple, et, dans le fond de notre pensée, avions-nous prétendu faire d’une question de méthode une question de parti ? Quand nous excluons aujourd’hui du partage des allocations municipales les Frères de la doctrine chrétienne, est-ce bien parce que nous méconnaissons les services qu’ils rendent à la jeunesse, ou bien ne les sacrifions-nous pas plutôt à de vieilles rancunes, à des prédilections injustes, à des accusations hasardées ? Il serait temps cependant que l’instruction de l’enfance fût au moins un terrain neutre pour nos discordes, et qu’on n’inspirât pas, dès l’âge le plus tendre, aux élèves des différentes écoles mutuelles ou simultanées, ces passions haineuses qui déjà les divisent comme nous en deux camps ennemis.

  1. Voir à la fin de ce chapitre, page 87, le tableau progressif de leurs écoles.