Page:Loti - Aziyadé.djvu/323

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

sur ce guéret les racines en l’air ; tout alentour, c’étaient la mousse et l’herbe fine, des fleurs sauvages odorantes. — On ne porte ni bouquets ni couronnes sur les tombes turques.

Ce cimetière n’avait pas l’horreur de nos cimetières d’Europe ; sa tristesse orientale était plus douce, et aussi plus grandiose. De grandes solitudes mornes, des collines stériles, çà et là plantées de cyprès noirs ; de loin en loin, à l’ombre de ces arbres immenses, des mottes de terre retournées de la veille, d’antiques bornes funéraires, de bizarres tombes turques, coiffées de tarbouchs et de turbans.

Tout au loin, à mes pieds, la Corne d’or, la silhouette familière de Stamboul, et là-bas… Eyoub !

C’était un soir d’été ; la terre, l’herbe sèche, tout était tiède, à part ce marbre autour duquel j’avais noué mes bras, qui était resté froid ; sa base plongeait en terre, et se refroidissait au contact de la mort.

Les objets extérieurs avaient ces aspects inaccoutumés que prennent les choses, quand les destinées des hommes ou des empires touchent aux