Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/204

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Est-il possible qu’un de nos écrivains, dont les yeux se sont cependant ouverts depuis et qui s’est montré ardent patriote, ait pu écrire, peu avant la grande ruée barbare : « J’aime et j’admire la culture allemande sous toutes ses formes » ?

Un autre, et l’un des plus connus du public, n’a-t-il pas osé proférer ceci : « Ce qui représente à mes yeux le summum de la civilisation humaine, c’est le grand état-major allemand. » Ce serait plutôt pour faire pleurer que pour faire rire, et cependant c’est le rire qui s’est imposé à moi, car je venais précisément de feuilleter certain album des généraux de l’Allemagne, — pas des caricatures, notez bien, non, des portraits, qui se prenaient tout à fait au sérieux. Oh ! l’incurable bestialité inscrite sur ces figures sinistres et ridicules ! Oh ! ces bajoues de pachyderme, retombant sur de trop gros cous adipeux ou apoplectiques ! On eût dit un jeu de massacre, sans ces regards de vautour affamé, qui tout de suite glaçaient la drôlerie de leur premier aspect.

Un troisième enfin, — je n’en finirais plus si je les citais tous, — un troisième, qui s’est