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SON PLUS RECENT BAFOUILLAGE

à pied, emportant sur des brouettes ou sur les épaules de pauvres objets choisis très vite, presque au hasard, dans l’affolement suprême.

C’est alors que les routes se sont peuplées de processions à fendre l’âme, — nos routes de France, si jolies et si gaies pourtant à la splendeur de juin, avec leurs bordures de beaux arbres et leurs talus pleins de fleurs. Je n’avais plus vu de ces fuites éperdues depuis l’automne 1914, quand, après la violation éhontée de la Belgique, les premières hordes s’étaient jetées sur nous.

Et, pour quelques-uns, c’était même le second exode : On sait qu’au lendemain de nos victoires de la Marne, beaucoup étaient revenus, rassurés, n’imaginant pas que le Monstre nous préparait le « coup » de la Russie ; ils avaient même rebâti, replanté, ensemencé. — « Que retrouverons-nous, disaient-ils aujourd’hui, la prochaine fois que nous reviendrons ? » — Car, tous, ils comptaient bien revenir, et ils s’en allaient confiants malgré tout dans l’éternité de notre France.

Dieu merci, il faisait des temps merveil-