Page:Loti - L’Horreur allemande, 1918.djvu/50

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fil. Cela détourne de nous beaucoup d’obus, qui le plus souvent s’en vont tomber où nous ne sommes pas.

Cependant ils sont très nombreux, nos soldats bleus, dans cette ville qui est un cantonnement d’importance et qui est le lieu où ils viennent au repos, pour se remettre tout de même un peu de la vie plus dure des tranchées proches. À la grâce de Dieu, ils vont et viennent, s’empressent à mille travaux, sous la protection parfois illusoire des quelques camouflages qui les dissimulent. Bien plus malheureux, les pauvres, que ceux qui cantonnent dans des villes incomplètement saccagées, où restent encore des semblants de maisons, où des habitants ont eu l’héroïsme de vouloir demeurer malgré les averses d’obus ; dans ces villes-là au moins, ils verraient encore quelques visages de femmes, et des visages de petits enfants, très doux à regarder pour ceux qui sont pères de famille. Tandis qu’ici, rien ; ils se regardent entre eux et regardent les caves obscures où il leur faut trop souvent descendre s’abriter contre la mort.