Page:Loti - L’Inde (sans les Anglais).djvu/37

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Indiens dont la vie s’écoule au milieu des ruines saintes et qui se baignent dans les piscines des palais, pensent qu’il y a le soir des fantômes errants, de princes ou de rois, et évitent de se tenir dans l’ombre des grandes dagabas, par les nuits de lune.

D’ailleurs, c’est ici l’asile ombreux du recueillement et de la prière. Un calme d’église plane sur les sentiers, sur les délicats tapis d’herbe, où des fleurs semblables à de larges azalées tombent en pluie du haut des arbres.

Et combien sont touchantes, devant les statues brisées depuis deux mille ans, ces petites lampes constamment allumées sous bois, et ces fleurs toujours fraîches posées sur les vieilles pierres !

Dans l’Inde, on ne porte point de bouquets aux dieux, mais on fait d’admirables jonchées pour leurs autels : des jasmins à profusion — rien que les corolles, arrachées de la tige, — et des gardénias, et d’épaisses fleurs au parfum de tubéreuse, formant des nappes odorantes, sur la blancheur desquelles on sème ensuite quelques roses du Bengale, ou quelques hibiscus bien rouges… Et il y a tout cela ici, sur les dalles des temples écroulés qui s’absorbent lentement dans la terre.