Page:Loti - L’Inde (sans les Anglais).djvu/40

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les prêtres bouddhistes, dans une toge unie, teinte de beau safran, qui laisse à nu l’une de ses épaules et l’un de ses bras. Pour m’ouvrir le sanctuaire, il apporte une clef très ornée, longue de plus d’un pied. Avec sa jolie figure grave et ses yeux de mystique, s’avançant la clef à la main, il ressemble, sous le soleil qui le dore, à un saint Pierre en cuivre rouge qui serait vêtu de cuivre jaune.

Entre des touffes de pervenches roses, nous montons ensemble par un escalier taillé dans la roche, — et la jungle autour de nous agrandit son cercle désert.

À mi-hauteur du bloc principal, le sanctuaire est creusé, au cœur même de la pierre dure. D’abord une petite caverne, sorte d’atrium, qui contient la table des offrandes, couverte d’une fraîche nappe de gardénias blancs ; et au fond est l’entrée du lieu très saint, que ferment deux battants de bronze, avec une énorme serrure ouvragée.

Quand cette porte du fond s’ouvre, avec un grondement de métal, découvrant les grandes idoles peintes, c’est comme si on descellait un réservoir de parfums précieux : les essences de roses et de santal, tous les jours répandues, les gardénias et les tubéreuses, qui font par terre une épaisse neige blanche, embaument et grisent. Les dieux qui vivent là, dans une presque constante obscurité de souterrain, sont éternellement baignés d’exquises senteurs.