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MADAME CHRYSANTÈME

mère. Elle leur demande des bénédictions, la fortune, la sagesse…

Qui pourrait démêler quelles sont ses idées sur les dieux et sur la mort ? A-t-elle une âme ? Pense-t-elle en avoir une ?… Sa religion est un ténébreux chaos de théogonies vieilles comme le monde, conservées par respect pour les choses très anciennes, et d’idées plus récentes sur le bienheureux néant final, apportées de l’Inde à l’époque de notre moyen âge par de saints missionnaires chinois. Les bonzes eux-mêmes s’y perdent, — et alors, que peut devenir tout cela, greffé d’enfantillage et de légèreté d’oiseau, dans la tête d’une mousmé qui s’endort ?…


Deux choses insignifiantes m’ont quelque peu attaché à elle (il est bien difficile que le lien ne se resserre pas, à la longue). — Ceci d’abord :

Madame Prune, un jour, était allée nous chercher une relique de sa galante jeunesse, un peigne en écaille blonde d’une transparence rare ; un de ces peignes qu’il est de bon ton de poser au sommet des coques de cheveux, à peine enfoncé, les dents toutes dehors, comme en équilibre. L’ayant