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MADAME CHRYSANTHÈME

des improvisations sur le chamécen. D’autres chantent, en des modes suraigus, avec un sautillement continuel, comme des cigales en délire.

Madame Prune, ne pouvant plus faire mystère des sentiments trop longtemps refoulés qui l’agitent, m’entoure de tendres soins et me prie d’accepter quantité de gracieux souvenirs : une image, un petit vase, une petite déesse de la Lune en porcelaine de Satsouma, un irrésistible magot d’ivoire ; — je la suis en frémissant dans des recoins obscurs, où elle m’attire pour me faire en tête à tête ces cadeaux…


Vers neuf heures arrivent, avec un froufrou soyeux, les trois guéchas en vogue de Nagasaki, mesdemoiselles Pureté, Orange et Printemps, que j’ai louées quatre piastres par tête, — un prix excessif en ce pays.

Ces trois guéchas sont bien les mêmes petites créatures que j’avais entendues chanter, le jour pluvieux de mon arrivée, à travers les cloisons frêles du Jardin des Fleurs. Mais comme je me suis beaucoup japonisé depuis cette époque, elles me semblent aujourd’hui très diminuées, bien moins