Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/169

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celles-ci ; on les voit ricocher, comme des sauterelles dans l’herbe. Cela n’a pas duré une minute, ce petit arrosage de plomb, et déjà cela cesse. Sur la grande plaine verte, le silence absolu revient, et nulle part on n’aperçoit rien qui bouge.

Ils sont tous les six encore debout, l’œil au guet, prenant le vent, ils cherchent d’où cela a pu venir.

De là-bas, sûrement, de ce bouquet de bambous, qui fait dans la plaine comme un îlot de plumes, et derrière lesquels apparaissent, à demi cachées, des toitures cornues. Alors ils y courent ; dans la terre détrempée de la rizière, leurs pieds s’enfoncent ou glissent ; Sylvestre, avec ses jambes plus longues et plus agiles, est celui qui court devant.

Rien ne siffle plus ; on dirait qu’ils ont rêvé…

Et comme, dans tous les pays du monde, certaines choses sont toujours et éternellement les mêmes, — le gris des ciels couverts, la teinte fraîche des prairies au printemps, — on croirait voir les champs de France, avec des jeunes hommes courant là gaîment, pour tout autre jeu que celui de la mort.

Mais, à mesure qu’ils s’approchent, ces bambous montrent mieux la finesse exotique de leur feuillée,