Page:Loti - Pêcheur d Islande.djvu/207

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tait ; il semblait que cela vînt par petits jets, par secousses légères ; les choses éternelles avaient l’air de s’illuminer par transparence, comme si des lampes à flamme blanche eussent été montées peu à peu, derrière les informes nuées grises ; — montées discrètement, avec des précautions mystérieuses, de peur de troubler le morne repos de la mer.

Sous l’horizon, la grande lampe blanche, c’était le soleil, qui se traînait sans force, avant de faire au-dessus des eaux sa promenade lente et froide commencée dès l’extrême matin…

Ce jour-là, on ne voyait nulle part de tons roses d’aurore, tout restait blême et triste. Et, à bord de la Marie, un homme pleurait, le grand Yann…

Ces larmes de son frère sauvage, et cette plus grande mélancolie du dehors, c’était l’appareil de deuil employé pour le pauvre petit héros obscur, sur ces mers d’Islande où il avait passé la moitié de sa vie…

Quand le plein jour vint, Yann essuya brusquement ses yeux avec la manche de son tricot de laine et ne pleura plus. Ce fut fini. Il semblait complètement repris par le travail de la pêche, par le train