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LE ROMAN D’UN ENFANT

Or, un jour, comme à souhait, une lettre arriva, qui fut tout un événement dans la maison. Elle était d’un cousin germain de mon père, élevé jadis avec lui fraternellement, mais qui, pour je ne sais quelles causes, n’avait plus donné signe de vie depuis trente ans. Quand je vins au monde, on avait déjà complètement cessé de parler de lui dans la famille, aussi ignorais-je son existence. Et c’était lui qui écrivait, demandant que le lien fût renoué ; il habitait, disait-il, une petite ville du Midi, perdue dans les montagnes, et il annonçait qu’il avait des fils et une fille, dans les âges de mon frère et de ma sœur. Sa lettre était très affectueuse, et on lui répondit de même, en lui apprenant notre existence à tous les trois.

Puis, la correspondance ayant continué, il fut décidé qu’on m’enverrait passer les vacances chez eux, avec ma sœur qui jouerait là, comme pendant nos voyages dans l’île, son rôle de mère auprès de moi.

Ce Midi, ces montagnes, cet agrandissement subit de mon horizon, — et aussi ces nouveaux cousins tombés du ciel, — tout cela devint l’objet de mes constantes rêveries jusqu’au mois d’août, moment fixé pour notre départ.