Page:Louÿs - Œuvres complètes, éd. Slatkine Reprints, 1929 - 1931, tome 3.djvu/23

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» Mais tu es la femme aussi, et dans le soir du même jour, l’homme aussi t’a fécondée.

» Tu portes en toi l’être obscur qui ne serait rien que lui-même et que son père n’a pas prévu et que son fils ignorerait. J’en prendrai le germe dans mes eaux. Il restera dans le néant.

» Tu as été pleine de haine parce que tu as tout appris. Et je te ferai tout oublier. C’est à la louange des bienheureuses ténèbres. »

Elle ne comprit pas bien ce qu’il avait dit, mais elle le remercia en pleurant.

Elle entra dans le lit du fleuve s’y purifier du satyre et quand elle revint sur la berge, elle avait perdu tout souvenir de sa douleur et de sa joie.


Mélandryon ne parlait plus. Les femmes restaient silencieuses. Pourtant, Rhéa vint à demander :

« Et Kastôr et Polydeukès ? tu n’en as rien dit. C’étaient les frères d’Hélène.

— Non. C’est une mauvaise légende, ils ne sont pas intéressants. Hélène seule est née du Cygne.

— Comment le sais-tu ?

— …

— Et pourquoi dis-tu que le Cygne l’a blessée avec son bec ? Cela n’est pas dans la légende et ce n’est pas vraisemblable… Et pourquoi dis-tu que Lêda était bleue comme l’eau dans la nuit ? Tu as une raison pour le dire.