Aller au contenu

Page:Louis Delaporte - Voyage d'exploration en Indo-Chine, tome 1.djvu/107

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

À deux kilomètres environ de Preadac, en suivant la route moderne de chars qui conduit vers l’est, on rencontre une construction assez singulière que les habitants appellent la Cage du Rhinocéros. C’est une fosse rectangulaire de 40 mètres sur 20, parementée en pierre. Une sorte de chaussée, plus basse que les murs de soutènement, la traverse dans sa plus petite dimension ; elle est coupée au milieu. À l’un des angles de la fosse est un escalier qui permet d’y descendre.

En continuant à suivre la route, on laisse au nord la colline appelée Pnom Boc, on traverse le village de Sena Cream, et l’on arrive à l’immense plaine couverte de bay kriem pulvérisé qui a été indiquée dans le chapitre précédent comme le lieu d’exploitation de cette pierre. Au delà, près du village de Ben, est un sanctuaire ruiné, composé d’une enceinte et d’une tour. On y trouve employés toutes sortes de matériaux, bay kriem, grès, briques. Sur le sommet le plus voisin de Pnom Coulen, au pied duquel se trouvent les carrières de grès dont nous avons déjà parlé, les indigènes disent qu’il y a une statue de Bouddha dans le repos, de 9 mètres de longueur, sculptée dans un seul bloc.

À peu de distance de la montagne, dans le sud-est, et en pleine forêt, s’élève la belle résidence de Méléa. Le style, les dimensions, le choix des matériaux, la variété de décoration de cet édifice ne le cèdent peut-être qu’à Angcor Wat. On est ici sur le territoire cambodgien de la province de Compong Soai, dont les limites ont été jusqu’à présent très-inexactement indiquées sur les cartes. En avant de Méléa, sur le sentier qui y conduit, on rencontre un énorme bloc de pierre auprès duquel est un petit sanctuaire en forme de croix, qui autrefois, dit-on, était en grande vénération. On peut voir sur la pierre des traces d’encastrement indiquant qu’il y avait là jadis un toit abritant sans doute une statue ou un autel. Un peu plus loin est une petite enceinte rectangulaire de 30 à 40 mètres de côté, qui renferme un sanctuaire central et un petit édicule. Le sanctuaire est en grès ; l’enceinte et Pédicule sont en pierre de Bien-hoa. Cette construction, peu intéressante en elle-même, occupait peut-être l’angle de l’une des enceintes extérieures de la résidence voisine qu’il nous reste à décrire.

Méléa[1]. — C’est un édifice à galeries et le type le plus complet du genre. Il est à désirer qu’un plan plus exact, plus détaillé que celui que nous donnons, en soit minutieusement établi ; il permettrait de formuler d’une manière définitive les lois générales de l’architecture khmer.

Comme à Angcor Wat, la partie extérieure de l’édifice se compose d’une galerie rectangulaire présentant au dehors une double rangée de colonnes et servant de première enceinte au sanctuaire. Elle mesure environ 160 mètres sur 140. Deux autres galeries rectangulaires à murs pleins lui sont concentriques. Les parties nord et sud du rectangle le plus intérieur se prolongent jusqu’au côté est de la galerie extérieure, et forment les deux côtés d’une construction supplémentaire, analogue à celle qui, à Angcor Wat, relie le premier étage au second. Cette construction comprend quatre cours intérieures d’une grande beauté. Une double colonnade règne sur leurs quatre faces et repose sur un

  1. Voy. Atlas, 1re partie, planche XIV, le plan de ce monument.