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nouveaux, l’activité de ses ouvriers et le talent de son architecte.

Cet autre projet était celui-ci : Relever les ruines, mais construire au pied de la roche tuffeuse qui les supportait, et avec des éléments empruntés à cette même roche, un bâtiment distinct destiné à la manufacture en enfantement. Céda-t-il à la répugnance qu’inspirait aux habitants du village la transformation de l’édifice féodal en établissement industriel, ou bien entrevit-il par l’étude plus approfondie de cette question des difficultés d’application qui ne s’étaient pas tout d’abord présentées à son esprit ? je ne sais. Mais s’il changea quelque chose à ses projets, ce fut après avoir mûrement réfléchi ; et, si les arts industriels y ont gagné, l’art lui-même n’y a rien perdu.

La nouvelle manufacture de la Sône s’éleva donc, reproduisant jusque dans ses moindres détails la manufacture de Turin. Quand elle fut terminée, que de grands toits rouges recouvrirent de grandes salles bien claires, Étienne Jubié fit venir de Piémont les ouvriers qu’il avait dressés pendant son séjour dans cette ville, et, avec leur concours, installa à la Sône sa filature modèle.

Certaines industries, comme certaines civilisations, ont des commencements humbles et difficultueux. Elles ne prospèrent qu’à force de sacrifices, d’efforts ; il faut beaucoup semer, beaucoup peiner pour recueillir. Tel ne fut pas le cas de la belle industrie qui venait apporter la célébrité et la fortune à cet humble village, encore tout imprégné des souvenirs de la féodalité et courbé depuis huit siècles sous le poids de ces souvenirs. La venue d’Étienne Jubié fut l’origine de la transformation du village et de la prospérité de ses