Page:Lourié - La Philosophie de Tolstoï.djvu/123

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Toutes les lois, mêmes celles qu’on a fait passer pour divines, sont faites par des hommes ; or, les hommes ne sont pas infaillibles ; de quelque autorité extérieure qu’ils soient investis, les hommes faillibles ne peuvent pas devenir infaillibles par ce seul fait qu’ils se réunissent en une assemblée à laquelle ils donnent le nom de Sénat ou quelque autre analogue. C’est par la violence que le pouvoir maîtrise les personnalités qui lui sont insoumises.

Les défenseurs de la conception sociale actuelle cherchent d’ordinaire à confondre la notion du pouvoir, c’est-à-dire la violence, avec la notion de l’influence morale, mais cette confusion est absolument impossible.

L’influence morale agit sur les désirs même de l’homme et les modifie dans le sens même de ce qu’on lui demande. L’homme qui subit l’influence morale agit selon ses désirs. Tandis que le pouvoir, dans le sens ordinaire de ce mot, est un moyen de forcer l’homme à agir contrairement à ses désirs. L’homme soumis au pouvoir agit, non pas comme il veut, mais comme il est obligé de le faire, et c’est seulement par la violence physique, c’est-à-dire l’emprisonnement, la torture, ou par la menace de ces châtiments, qu’on peut forcer l’homme à faire ce qu’il ne veut pas. C’est en cela que consiste et a toujours consisté le pouvoir. La base du pouvoir est la violence physique ; et la possibilité de faire subir aux hommes une violence physique est due surtout à des hommes mal organisés, de telle façon qu’ils agissent d’accord, tout en se soumettant à une seule volonté. Ces réunions d’individus armés qui obéissent à une