Page:Lucain, Silius Italicus, Claudien - Œuvres complètes, Nisard.djvu/748

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siècles de vie. La fortune ne l’a pas emporté dans son tourbillon, et forcé, hôte inconstant, à boire à des sources inconnues. Marchand, il n’a point pâli à l’aspect des flots ; soldat, au son des trompettes : le barreau ne l’a pas fatigué de ses orageux débats ; étranger aux affaires, à la cité voisine, il jouit sans obstacle de la beauté du ciel. C’est par le retour des moissons, et non par les consuls, qu’il compte les années ; les fruits lui marquent l’automne, les fleurs le printemps ; pour lui dans le même champ s’éteint et renaît le soleil : le cercle de son domaine est le cercle du jour. Ce chêne, il l’a vu, germe faible, s’élever, et ce bois naître et vieillir avec lui. Malgré son voisinage, Vérone lui semble l’Inde lointaine, le Benac la mer Érythrée. Le temps a respecté ses forces ; de ses bras vigoureux, aïeul robuste, il étonne encore ses neveux. Qu’un autre coure et pénètre jusqu’aux colonnes d’Hercule ; il a plus voyagé, mais ce vieillard a plus vécu.

SUR UN SANGLIER ET UN LION.

Un sanglier farouche et un superbe lion mesurèrent un jour leurs forces. Le premier hérisse ses soies, le second sa crinière : l’un a les faveurs de Mars, l’autre celles de Cybèle : tous deux partagent l’empire des forêts, tous deux ont fatigué le bras d’Hercule.

DESCRIPTION D’UN TROUPEAU.

Jamais elle ne produisit de semblables troupeaux, la terre où régna jadis le triple Géryon. Moins blancs, ô Clitumne ! sortent des eaux où tu les baignes, les bœufs que la piété a voués à Jupiter-Tarpéien. Tel n’était pas le taureau qui faisait voler les sables de Sidon, alors qu’il rapporta un fardeau précieux. Les champs de la Crète, Gnosse, témoin de monstrueuses amours, l’Ida même, n’élevèrent jamais de pareils nourrissons. Le jeune Crétois qui unit au corps d’un monstre le corps d’un mortel, et trahit par sa forme bizarre le crime de sa mère, n’aurait pas offert tant de beautés, quand son corps aurait reproduit tous les traits de son père.

SUR UNE CONQUE.

Naïade de Castalie, transportez ici vos sources limpides, et faites-les couler dans le sein entr’ouvert de cette conque éblouissante. L’onde où la docte Sérène auia lavé son front aura plus de vertu que les eaux d’Hippocrène.

SUR UN CRISTAL QUI RENFERMAIT UNE GOUTTE D’EAU.

Le cristal conserve des traces de sa nature