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Mercure et Charon

Mercure

Faisons nos comptes, nocher, si tu veux bien ; voyons combien tu me dois, afin que nous n’ayons pas de nouvelles discussions à ce propos.

Charon

Faisons nos comptes, Mercure ; il vaut mieux que nous soyons fixés à cet égard et que nous n’ayons pas d’affaire.

Mercure

Je t’ai apporté, d’après ta commission, une ancre de cinq drachmes.

Charon

C’est cher !

Mercure

Par Pluton, je l’ai achetée cinq bonnes drachmes ; et une courroie à lier les rames, deux oboles.

Charon

Mets cinq drachmes et deux oboles.

Mercure

Plus une aiguille pour raccommoder la voile, cinq oboles.

Charon

Ajoute-les.

Mercure

Plus de la cire pour boucher les trous de ta barque, des clous, un câble dont tu as fait une hypère, le tout deux drachmes.

Charon

Fort bien ! tu as acheté cela à bon marché.

Mercure

Voilà ; à moins que nous n’ayons oublié quelque chose dans le calcul. Quand donc dis-tu que tu me payeras cela ?

Charon

Aujourd’hui, cela m’est impossible, Mercure ; mais si une peste, une guerre, nous envoie ici nombreuse compagnie, on trouvera quelque chose à gagner sur la quantité, en fraudant sur le péage.

Mercure

Et moi, je serai réduit à souhaiter que ces fléaux arrivent, pour y trouver à rentrer dans mes fonds.

Charon

Il n’y a pas d’autre moyen, Mercure. Il nous vient bien peu de monde, comme tu vois ; on est en paix.

Mercure

Cela vaut encore mieux, dût ton remboursement se faire attendre ! Cependant tu te rappelles, Charon, quels morts nous arrivaient autrefois, tous braves, couverts de sang, presque tous blessés. Maintenant, c’est un homme empoisonné