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LE MAL DES ARDENTS

Le soir même, en rentrant à son bureau, Bernard supputait les chances de son affaire ; elle devait faire un chiffre d’affaires égal à son capital dans l’année, donc, normalement un million de bénéfices ; en capitalisant les actions à cinq pour cent cela les mettait à 4,000 francs ; trois mille francs de gain par action. Que devait-il ? Il devait neuf cent mille francs aux chantiers de l’Atlantique et, en tant que compagnie de navigation, il devait également neuf cent mille francs à la Cie Bordes soit dix-huit cent mille francs. Là dessus, il avait huit cent mille francs en Banque. Restait à trouver un million dans douze mois ; eh bien ! il vendrait 250 actions dès que celles-ci seraient montées à quatre mille francs. Combien en avait-il d’actions ? quatre mille représentant ses apports, plus 250 anciennes environ. Il pouvait largement tenter l’opération. La combinaison était incontestablement saine ; l’échafaudage solide. Que de chemin parcouru ! Il refit par la pensée tout le travail de ces six mois et s’y attarda complaisamment ; oui, tout cela n’était pas mal combiné. Évidemment, pour quiconque aurait été au courant du processus exact de ses actes, il y avait de quoi l’envoyer aux galères ; mais où commence l’escroquerie, où finit-elle ? Et quelles armes pouvait-on avoir contre lui ? Aucune, aucune. Pas une ligne de son écriture, pas une confidence, par un conciliabule. Ranquillos, Sernola, Fougnasse avaient agi sans rien comprendre. Pour Sernola, Ranquillos avait bien remis l’argent à Mulot et Blinkine ; ou alors il avait trompé à la