Page:Luzel - Contes bretons, Clairet, 1870.djvu/62

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nons à la reine, sœur de Jean, et voyons si elle aussi est heureuse.

Elle avait empoisonné son mari et, pour fuir l’indignation de son peuple et le châtiment qui l’attendait, elle s’était vue forcée de partir seule et de nuit, et déguisée en mendiante. Elle erra longtemps, abandonnée de tous, et demandant l’aumône de porte en porte. À force de marcher, pour s’éloigner de son pays, elle finit par arriver à la porte du château où se trouvaient Jean et la princesse. Son frère la reconnut et, comme il avait bon cœur, il oublia tout et la reçut, comme si elle ne lui avait jamais fait aucun mal. Mais le malheur ne l’avait pas corrigée et, voyant son frère heureux, elle fut, vite, jalouse de son bonheur et chercha encore les moyens de le perdre. Elle alla trouver une vieille sorcière qui habitait dans le bois voisin, et la consulta sur la manière de se débarrasser de lui. La sorcière lui dit :

— Mettez-vous au lit, et dites que vous êtes dangereusement malade. Votre frère ira vous voir et vous demandera ce qui pourrait vous faire plaisir. Dites-lui qu’un peu de bouillie de pur froment vous ferait grand bien, mais qu’il faut qu’il aille lui-même chercher la farine au moulin. Il s’y rendra avec empressement, et quand il s’en retournera, par le bois, je creuserai sous ses pieds un puits profond, où il tombera, sans jamais pouvoir en sortir en vie.

La méchante sœur revint à la maison, et fit tout ce que lui avait conseillé la sorcière. Elle se mit au lit, dès en arrivant, envoya son frère au moulin, et celui-ci, au retour, tomba dans l’abîme que la sorcière ou-