Page:Luzel - Contes populaires, volume 3, 1887.djvu/81

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— Je sens odeur de chrétien ! il y a un chrétien ici, et il faut que je le mange !

— Ne croyez pas cela, mon fils, que je vais vous le laisser manger, ce joli petit chrétien ; mais, songez plutôt à le dédommager du mal que vous lui avez fait, — dit la vieille.

Et, prenant Jean par la main, elle le fit sortir de dessous la table. L’Ouragan, en le voyant, ouvrit une bouche énorme et voulut se précipiter sur lui, pour l’avaler. Mais, sa mère lui dit, en lui montrant du doigt un sac, qui était suspendu à une poutre de la hutte :

— Voulez-vous être mis en prison ?

Et il se calma aussitôt. Alors le tailleur s’enhardit et lui dit :

— Bonjour, Monseigneur l’Ouragan ; vous m’avez ruiné.

— Comment cela, mon brave homme ? répondit l’Ouragan, avec douceur.

— Vous avez enlevé tout mon lin de la prairie où ma femme l’avait étendu pour sécher.

— Cela n’est pas vrai, et ta femme est une menteuse et une paresseuse. Mais, comme tu es un honnête homme, toi, et un bon travailleur, et que, malgré tout le mal que tu te donnes, tu ne seras jamais que pauvre, avec ta femme, je veux te récompenser de la peine que tu as eue en venant jusqu’ici, et de ta confiance en ma justice.