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ANNE LUCAS
Première version
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I

  Anne Lucas disait
Au seigneur Le Glazon, un jour :[1]
Quand sera la linerie à la métairie,
Seigneur Le Glazon j’y irai ?

  — Anne, ce n’est pas votre affaire
D’aller, cette année, aux lineries ;
D’aller, cette année, aux lineries,
Anne Lucas, restez à la maison.

  Anne Lucas disait
À la fermière, un jour :
— Quand sera la linerie dans votre maison,
Fermière, je veux y aller.

  — Anne, vous avez parlé trop tard,
Car c’est aujourd’hui la linerie….
— Quand vous irez leur porter le goûter,[2]
J’irai avec vous, en me promenant

  Quand ils ont pris leur repas,
Les jeunes gens sont joyeux et gais ;
Et ils ont commencé de jouer,
Et voilà Anne au milieu des ébats !

  Si bien que son nez commença de saigner,
Et ses seins de dégoutter.
Et tout le monde disait, grands et petits :
— Anne Lucas, a failli !

  Et Anne Lucas, pleurait,
Et elle ne trouvait personne pour la consoler ;
Et elle ne trouvait personne pour la consoler,
Si ce n’est la fermière, celle-là le faisait :


  1. Les manoirs portant le nom de « Kerglas, Ar Glas, Ar Glason » — sont communs en Bretagne. Tous ces noms indiquent des habitations couvertes d’ardoises, comme l’étaient les châteaux, et généralement les manoirs et les gentilhommières, tandis que les fermes et les habitations des simples paysans et des ouvriers étaient presque toujours couvertes de chaume.
  2. « Merenn » se dit, dans certaines localités, du second repas de la journée, celui qui se fait à dix heures, ordinairement, et ailleurs il désigne le troisième repas, celui qui se fait vers trois heures, et qui se porte généralement aux champs, en été. Ici, Il ne peut être question que de ce dernier.