Page:Luzel - Veillées bretonnes, Mauger, 1879.djvu/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pour son coup d’essai, son oncle le chargea de dérober un bœuf gras de l’étable d’un seigneur des environs. Bilz s’en tira à merveille et amena le bœuf à son oncle, dans un champ de genêt, où il attendait. C’était la nuit. L’animal fut aussitôt tué, écorché et dépecé.

— Tiens, dit l’oncle à Bilz, voilà ta part. Et il lui donna la peau.

— Comment ! je n’aurai que la peau ? dit Bilz, lorsque c’est moi qui ai eu toute la peine et couru le danger ?

— Il me semble, répondit l’oncle, que tu devrais être satisfait, puisque je veux bien t’apprendre encore le métier.

— Donnez-moi au moins un peu de viande, pour ma mère.

— Eh ! bien, voilà les poumons ; porte-les lui et reviens, vite.

Bilz n’était pas content. Il prit la peau du bœuf avec les poumons, les chargea sur son dos, pour les porter à sa mère, et tout en allant, il maugréait et méditait une vengeance. En suivant le sentier qui traversait la genêtaie, l’idée lui vint de nouer deux à deux des branches de genêt prises des deux côtés, de manière à former des obstacles, des barrages qui feraient trébucher son oncle, quand il voudrait passer. Cela fait, il monta sur le talus qui entourait le champ, suspendit sa peau de bœuf à une branche d’arbre et se mit ensuite à la battre avec un bâton, en criant de toutes ses forces : au voleur ! au voleur !…