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RIENZI.

quelques exclamations sans suite, quelques caresses d’une joie sauvage. Nina leva sa tête appuyée jusque-là sur le sein de son mari, et regarda tristement son visage. « Oh ! qu’est-ce qui t’est arrivé depuis notre séparation, depuis le moment où, emporté par ton audace et les caprices de ta destinée, tu m’as laissée à la cour impériale pour venir chercher encore une couronne, à ce que tu croyais, et ne trouver que des fers ? Ah ! pourquoi ai-je obéi à tes ordres ? Pourquoi t’ai-je laissé partir seul ? Que de fois, dans ta marche, dans tes incertitudes, dans tes périls, que de fois tu aurais pu te reposer sur ce sein ! Que de fois le murmure de cette voix eût glissé des consolations dans ton âme ! Tu te portes bien, mon seigneur, mon Rienzi ? Ton pouls bat plus vite qu’autrefois, ton front est ridé. Ah ! dis-moi que tu te portes bien !

— Bien : dit machinalementRienzi, du moins à ce qu’il me semble. Quand l’âme est malade, les souffrances du corps s’émoussent. Bien, oui ! Et toi, toi, au moins, tu n’es pas changée, si ce n’est que ta beauté se mûrit tous les jours davantage. L’éclat de la couronne de lauriers ne s’est pas effacé de ton front. Tu pourras encore un jour… là il brisa brusquement le fil de son discours. Rome, parle-moi de Rome ! Et toi, comment es-tu entrée ici ? Ah ! peut-être qu’on a signé ma condamnation, et que, dans leur miséricorde, ils m’ont accordé de te voir encore une fois avant que le bourreau me bande les yeux. Je me rappelle que c’est la grâce accordée aux malfaiteurs. Quand je disposais aussi en maître de la vie et de la mort, je permettais de même au plus vil criminel de faire, ses adieux à ceux qu’il aimait.

— Non, non, ne dis pas cela, Rienzi ! s’écriait-elle, en lui mettant la main sur la bouche. Je t’apporte de meilleures nouvelles. Demain on t’entendra. La cour est par faitement disposée en la faveur. Tu seras acquitté.

— Ah ! répète-moi cela.