Page:Méchin-Desquins - Traduction libre de la cinquième satire de L. Arioste, 1846.djvu/7

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Bientôt nous entendrons un public imposteur
D’un crime qui n’est pas proclamer l’existence
Et la déshonorer, malgré son innocence.


As-tu vu sans effroi cet affligeant tableau ?
Un autre plus touchant naîtra sous mon pinceau :
Regarde, sous le toit de cet octogénaire,
Ce nouveau-né presser le doux sein de sa mère ;
Une fille au berceau s’éveille en gazouillant,
Tandis que deux bambins, près de là folâtrant,
Font les premiers essais des doux jeux de l’enfance.
Cependant le vieillard, dans un morne silence,
De la mort qui l’attend maudit l’affreux pouvoir.
Hélas ! il a perdu le séduisant espoir
De protéger long-temps sa naissante famille ;
Il frémit des dangers qui menacent sa fille
Et semble déjà voir ses trois fils malheureux
Dépouillés du trésor qu’il amassa pour eux.
Mais garde-toi, surtout, de l’exemple bizarre
De ces vieux libertins, l’opprobre de Ferrare !
Long-temps de l’hyménée ils ont fui les liens ;
Ils redoutaient des fils qui, trop tôt, de leurs biens.
Oseraient demander une faible partie.
Des mains du traître amour une flèche partie
Trop tard vient dans leur cœur allumer les désirs ;
Et, sous leurs cheveux blancs, honteux de leurs soupirs,
A d’ignobles objets ils portent leurs caresses.
Ils reçoivent bientôt de leurs viles maîtresses
Des enfants que la honte a devancés au jour ;
Et, pour rendre à l’honneur ces fruits d’un fol amour,
A jamais enchaînés par la foi conjugale,
D’une indigne servante ils se font une égale.