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HISTOIRE DE LA LITTERATURE ERANÇAISE 29

M. Suchier, après une introduction sur l'origine de l'épopée française, sur sa forme, sur les jongleurs, etc. ', examine les poèmes qui nous sont parvenus, en les rangeant dans l'ordre convenu des trois grandes gestes {geste du Roi, geste de Garin, geste de Dooii), puis des petites gestes et poèmes isolés; cet ordre, il le dit lui-même, est assez peu satisfaisant, mais il est difficile de lui en substituer un autre. Voici quelques remarques sur cha- cun des quatre paragraphes :

La geste du. Roi. — A propos de la Chanson de Roland, je ne vois pas quelles sont les « sources franques » qui disent que Charles, en 778, prit Saragosse; en revanche, je crois, comme je l'ai récemment indiqué ^ et comme j'essaierai de l'établir prochainement, que les sources arabes prouvent que c'est la chanson de geste qui a raison contre les historiens francs en faisant figurer les musulmans à Roncevaux. La part prise à ce désastre par le duc Loup et la pendaison qui en aurait été le châtiment (p. 26) ne sont, on le sait, attestées que par la charte d'Alaon, dont aucun historien n'admet aujourd'hui l'authenti- cité; il est possible, cependant, qu'une tradition authentique

��1. L'idée que les Lorrains assenaient primitivement en -/ d'un bout à l'autre a été émise avant M. Stengel (p. 21 ; voir G. Paris, Ètiute sur t'acceiit latin, p. 115). — P. 21, il me semble un peu excessif de dire que « du ix" au xie siècle la chanson de geste, avec la poésie lyrique populaire, constituait la nourriture intellectuelle de la plus grande partie delà nation ». Les chansons de geste, surtout les plus anciennes, ne pouvaient guère être goûtées que par la classe guerrière, pour laquelle elles étaient composées ; il est bien vrai que « la culture était à peu près au même niveau » pour toutes les classes ; mais les faits et les personnages de l'épopée, aussi bien que les sentiments qui l'animent, ne devaient guère avoir d'intérêt pour « les bourgeois et les paysans ». C'est quand l'épopée fut plutôt une œuvre d'imagination qu'une représentation de la réalité qu'elle put être comprise en dehors de la classe guerrière : le Pèlerinage de Charlemagne, qui est un pur conte, est peut-être ce qui a été fait de plus ancien en ce genre. — Page 28, je ne sais sur quoi s'appuie l'auteur pour dire que la cifonie (ou cifoigne), vielle dont les aveugles, dans les derniers temps du moven âge, se servaient pour accompagner la récitation des chansons de geste, se jouait primitivement à quatre mains ; le renseignement est intéressant [cf. ci-dessous, p. 70, n. i].

2. Revue de Paris, 15 septembre 1901 [et Légendes du moyen dge (1^0^) : Roncevaux] .

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