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MÉMOIRE

les couperoses ; fixer sur les tissus plusieurs couleurs qu’on regardait comme faux teint, et remplacer le sucre de canne par celui de betterave, l’indigo de l’anil par celui du pastel et l’écarlate de cochenille par la garance. On eût dit que les savans détournaient leur attention de dessus les misères publiques pour ne la fixer que sur les moyens de soulager le peuple et d’alléger le fardeau de son infortune.

Quoique ces découvertes et beaucoup d’autres soient aujourd’hui des opérations de fabrique, il est à craindre que quelques-unes ne retombent dans l’oubli, ou par la facilité qu’on a de puiser aujourd’hui aux anciennes sources, ou par suite de l’habitude et des préjugés qui recommandent aux yeux du consommateur, ce qui est usité depuis long-temps, ou enfin par de fausses mesures en administration ; et je crois qu’il serait extrêmement utile de décrire avec soin tous ces procédés et de les confier à nos neveux. On verrait au moins ce qu’a pu la science pour la prospérité d’une nation ; et l’on en retirerait cette vérité consolante, c’est que la France peut se suffire à elle-même pour satisfaire à tous ses besoins.

Je me bornerai aujourd’hui à faire connaître comment la France est parvenue à suppléer au sucre du nouveau-monde, par des produits de son sol ; et si l’Institut agrée ce travail, j’aurai l’honneur de lui soumettre successivement tous les divers procédés de fabrication qui peuvent intéresser l’industrie, le commerce, et la nation.

On se rappelle avec effroi ces temps difficiles où les Français, exilés des mers, n’avaient plus aucune communication, ni avec leurs colonies, ni avec celles des autres nations. La France se trouva privée, tout-à-coup, de tous les produits de l’Asie et de l’Amérique, dont la plupart sont devenus pour