Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 12.djvu/106

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la parole qu’une seule fois, et ce fut pour inviter l’huissier de la chambre des communes à fermer une fenêtre dont le courant d’air aurait pu enrhumer l’orateur qui discourait alors. Si les huissiers de Lyon, pendant la consulte italienne ; si les huissiers du sénat, à Milan, avaient été moins soigneux, peut-être que par bonté d’ame, Volta, ne fût-ce qu’un moment, aurait vaincu son extrême réserve ; mais l’occasion manqua, et l’illustre physicien sera inévitablement rangé dans la catégorie de ces personnages qui, timides ou indifférents, traversent pendant de longues révolutions les assemblées populaires les plus animées, sans émettre un avis, sans proférer un seul mot.

On a dit que le bonheur, comme les corps matériels, se compose d’éléments insensibles. Si cette pensée de Franklin est juste, Volta fut heureux. Livré tout entier, malgré d’éminentes dignités politiques, aux travaux de cabinet, rien ne troubla sa tranquillité. Sous la loi de Solon on l’aurait même banni, car aucun des partis qui, pendant près d’un quart de siècle, agitèrent la Lombardie, ne put se vanter de le compter dans ses rangs. Le nom de l’illustre professeur ne reparaissait après la tempête, que comme une parure pour les autorités du jour. Dans l’intimité même, Volta avait la plus vive répugnance pour toute conversation relative aux affaires publiques ; il ne se faisait aucun scrupule d’y couper court, dès qu’il en trouvait l’occasion, par un de ces jeux de mots qu’en Italie on appelle freddure, et en France calembourg. Il faut croire qu’à cet égard une longue habitude ne rend pas infaillible, car plusieurs des freddure du grand physicien, qu’on n’a pas dédaigné de citer, sont loin d’être aussi irréprochables que ses expériences.