Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 17.djvu/13

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DE M. DE JUSSIEU. Ilj

inspiraient des réf^ions si riches et si nouvelles, retenu ensuite par les habitants du pays qui, frappés d’une épidémie, redoutaient le départ d’un médecin habile, il ne revit la France qu’après trente-six années des fatigues les plus pénibles, épuisé de corps et d’esprit, ayant perdu jusqu’à la mémoire de ce qu’il avait fait, et ne justifiant que trop, par tant d’épreuves et de malheurs, le titre que lui a donné Condorcet, de martyr de la botanique.

De ces trois frères, le seul qui ait eu sur la botanique, et, par la botanique, sur l’histoire naturelle entière, une de ces influences profondes qui marquent une époque dans les sciences, est Bernard. C’est lui qui, tandis que tous les autres botanistes français, à commencer par son frère Antoine, suivaient d’un pas timide les traces de Tournefort, s’ouvrait une route nouvelle, dans laquelle nul ne l’avait précédé encore, et dans laquelle nul ne devait aller plus loin que son neveu, M. I^aurent de Jussieu, à qui cet Éloge est consacré.

Antoine -Laurent de Jussieu, nt-veu et continuateur de Bernard, naquit à Lyon le la avril 1748.

Dès qu’il eut fini ses premières études, son oncle le fit venir à Paris, où il arriva au mois de juillet 1765, âgé de dix-sept ans et demi.

Il se trouva ainsi tout à coup auprès de l’homme qui, depuis ïournefort, tenait en France le sceptre de la botanique, et n’avait pour rival en Europe que le seul Linné : homme étonnant, dont le nom remplissait le monde savant, et qui n’avait presque rien écrit. Mais, s’il avait peu écrit, il avait beaucoup pensé ; il avait passé sa vie à méditer sur une de ces questions qui contiennent toutes les autres ques A2