Page:Mémoires de l’Académie des sciences, Tome 22.djvu/71

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faudra-t-il que, par une assimilation si souvent trompeuse, les représentants légaux du pays soient considérés comme les interprètes fidèles des vœux, des sentiments, des opinions de la majorité. L’exception dont je veux parler, c’est le gouvernement directorial qui me la fournira.

Lorsque les élections de l’an V apportèrent un nombreux renfort de royalistes aux deux minorités du conseil des Cinq Cents et du conseil des Anciens, qui jusque-là s’étaient bornées à faire au Directoire une opposition très-modérée lorsque, forte de ce qu’elle pensait être l’appui populaire, la minorité, se croyant devenue majorité, levait le masque jusqu’à nommer à la présidence du conseil des Cinq Cents ce même Pichegru qui, naguère, flétrissait par la trahison les lauriers qu’il avait cueillis en Hollande au nom de la République ; lorsque les ennemis du pouvoir directorial dévoilaient ouvertement leurs projets dans les salons du célèbre club de Clichy lorsque, aux récriminations, aux accusations réciproques, parvenues au dernier terme de l’exaltation, succédaient déjà des voies de fait contre les patriotes et les acquéreurs de biens nationaux, nos troupes étaient partout triomphantes. L’armée de Rhin-et-Moselle sous les ordres de Moreau, l’armée de Sambre-et-Meuse commandée par Jourdan, venaient de traversier glorieusement le Rhin ; elles marchaient au cœur de l’Allemagne, l’armée d’Italie était à vingt lieues de Vienne ; Bonaparte signait à Léoben les préliminaires d’un traité de paix vivement attendu. Il pouvait, sans compromettre les négociations, se montrer difficile même sur de simples questions d’étiquette ; il pouvait refuser net de mettre dans les protocoles le nom de l’empereur d’Allemagne avant celui de la