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Page:Mémoires de la comtesse de Boigne Tome III 1922.djvu/146

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MÉMOIRES DE MADAME DE BOIGNE

comme il est très probable, la dernière apparition de la sainte Ampoule pour les Rois très chrétiens, peut-être cela aurait-il stimulé ma curiosité. Malgré la magnificence sous laquelle on avait cherché à masquer les momeries, cléricales et féodales, de la cérémonie, elles excitèrent la critique.

Charles X, en chemise de satin blanc, couché par terre pour recevoir par sept ouvertures, ménagées dans ce vêtement, les attouchements de l’huile sainte, ne se releva pas, pour la multitude, sanctifié comme l’oint du Seigneur, mais bien un personnage ridiculisé par cette cérémonie et amoindri aux yeux de la foule.

Les oiseaux, lâchés dans la cathédrale en signe d’émancipation, ne furent que des volatiles incommodes ; et personne ne pensa à crier : « Noël, Noël. »

En revanche, lorsque le Roi, splendidement revêtu du manteau royal, prononça le serment du haut du trône, que les portes du temple s’ouvrirent à grand fracas, que les hérauts annoncèrent au peuple que leur Roi était sacré, que les acclamations extérieures se joignirent aux acclamations intérieures pour répondre, à la voix de ces hérauts, par le cri universel de : Vive le Roi, l’impression fut très vive sur tous les assistants.

Il y a toujours, dans les vieilles cérémonies, des usages pour qui le temps a formé prescription, et d’autres qui répondent constamment aux impressions générales. Le tact consiste à les discerner et l’esprit à les choisir.

C’est ce que l’Empereur avait su distinguer. Son couronnement, très solennel et très religieux, n’avait pourtant été accompagné d’aucune de ces prostrations que les prétentions de l’Église réclament et que l’esprit du siècle repousse. Je sais bien que les princes, en s’y soumettant, pensent ne s’humilier que devant le Seigneur ; mais le prêtre paraît trop en évidence pour pouvoir être com-