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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/235

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MISSION EN ITALIE.

de Boulogne, et que ceux-ci se trouvaient moins éloignés que le corps d’Augereau, qui pour se rendre de Brest aux frontières de Suisse, dans le Haut-Rhin, devait traverser la France dans toute sa largeur : le trajet était de trois cents lieues. Les troupes furent deux mois en route. Elles voyageaient sur plusieurs colonnes. Le maréchal Augereau, parti le dernier de Brest, les devança, et s’arrêtant d’abord à Rennes, puis successivement à Alençon, Melun, Troyes et Langres, il inspecta les divers régiments dont sa présence ranimait encore l’ardeur. Le temps était superbe. Je passai ces deux mois, courant sans cesse en calèche de poste, pour aller d’une colonne à l’autre transmettre aux généraux les ordres du maréchal. Je pus m’arrêter deux fois à Paris pour voir ma mère. Nos équipages avaient pris les devants ; j’avais un assez médiocre domestique, mais trois excellents chevaux.

Pendant que la grande armée se dirigeait vers le Rhin et le Danube, les troupes françaises cantonnées dans la haute Italie, sous le commandement de Masséna, se réunissaient dans le Milanais, afin d’attaquer les Autrichiens dans le pays vénitien.

Pour transmettre des ordres à Masséna, l’Empereur était obligé de faire passer ses aides de camp par la Suisse, restée neutre. Or, il arriva que pendant le séjour du maréchal Augereau à Langres, un officier d’ordonnance, porteur des dépêches de Napoléon, fut renversé de sa voiture et se cassa la clavicule. Il se fit transporter chez le maréchal Augereau, auquel il déclara qu’il était dans l’impossibilité de remplir sa mission. Le maréchal, sentant combien il importait que les dépêches de l’Empereur arrivassent promptement en Italie, me chargea de les y porter, en passant par Huningue, où je devais transmettre ses ordres pour l’établissement d’un pont sur le Rhin. Cette mission me fit grand plaisir, car j’allais