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Page:Mémoires du Baron de Marbot - tome 1.djvu/377

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RETOUR À PARIS.

rison de la blessure du maréchal Augereau, l’Empereur lui écrivit pour l’engager à se faire traiter en France, et fit venir d’Italie le maréchal Masséna, auprès duquel mon frère, Bro et plusieurs de mes camarades furent placés. Le maréchal Augereau me prit avec lui, ainsi que le docteur Raymond et son secrétaire. On était obligé de me porter pour monter et descendre de voiture ; je sentais, du reste, que ma santé se raffermissait à mesure que je m’éloignais des régions glaciales pour marcher vers un climat plus doux. Ma jument passa son hiver dans les écuries de M. de Launay, administrateur des fourrages de l’armée. Le maréchal se dirigea de Varsovie sur la Silésie, par Rawa. Tant que nous fûmes dans l’affreuse Pologne, où il n’existait aucune route ferrée, il fallut douze et jusqu’à seize chevaux pour tirer la voiture des fondrières et des marécages au milieu desquels nous marchions ; encore n’allait-elle qu’au pas, et ce ne fut qu’en arrivant en Allemagne que nous trouvâmes enfin un pays civilisé et de véritables routes.

Nous nous arrêtâmes à Dresde, et passâmes dix à douze jours à Francfort-sur-Mein, d’où nous étions partis au mois d’octobre précédent pour marcher contre la Prusse.

Enfin nous arrivâmes à Paris vers le 15 mars. Je marchais avec beaucoup de peine, j’avais un bras en écharpe et me ressentais encore du terrible ébranlement produit par la commotion du vent du boulet ; mais le bonheur de revoir ma mère et les bons soins qu’elle me donna, joints à la douce influence du printemps, achevèrent ma guérison.

Avant de quitter Varsovie, j’avais voulu jeter le chapeau que le boulet avait percé ; mais le maréchal, l’ayant fait garder comme objet de curiosité, le donna à ma mère. Il existe encore aujourd’hui entre mes mains, et c’est un monument de famille qu’il faudra conserver.