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Coulisses et tréteaux

tendresse pour ces enfants terribles qu’étaient les hervéistes. Mais depuis… j’avais lu les articles de L’Humanité, où Vaillant faisait son petit Blanqui, le Blanqui de la « Patrie en danger ». Et, qu’on m’excuse, j’étais furieux. De plus mon vieux H.-P. Gassier m’avait montré un certain Carnet B

De sa voix grave, profonde, le père Vaillant me salua :

— Comment allez-vous, citoyen Méric ?

Nous échangeâmes une poignée de main. Et Vaillant, à son tour, de m’interroger.

Alors je me vidai complètement. Il y avait un groupe autour de nous. Je dis tout : mes colères, mes dégoûts, les poings crispés contre les dirigeants du parti, toute l’amertume qui montait contre le socialisme en faillite. Vaillant n’en revenait pas. Sa voix se faisait plus sombre. Il dit encore :

— Mais, citoyen, réfléchissez… l’ennemi ?

Je criai :

— Citoyen Vaillant, l’ennemi, c’est notre maître. L’ennemi, ce n’est pas le pauvre bougre vêtu d’un uniforme boueux comme le mien. L’ennemi, ce sont les beaux messieurs couverts de galons qui ont tout à gagner de la guerre.

Je poursuivis sur ce ton, de plus en plus agressif. Vaillant me quitta, sans un mot, sans me tendre la main.

Alors Longuet me dit :

— Mon cher ami, vous venez de l’achever. La plupart de ceux qui reviennent de là-bas lui disent à peu près les mêmes choses. Mais vous êtes allé un peu fort.

Pauvre Vaillant. Il avait fait voter l’insurrection plutôt que la guerre à la veille de la catastrophe ! Pourquoi faut-il qu’il ait vu l’horrible chose !

Là-dessus, Longuet me prit par le bras et me confia :

— Il y a réunion du groupe. Je vais réclamer qu’on vous