Page:Méric - À travers la jungle politique et littéraire, 2e série, 1931.djvu/186

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leur « tendance ». Cela sans savoir le moins du monde ce que le discoureur avait dit, ce qu’il prétendait et quelles conclusions il proposait.

L’orateur le plus écouté et le plus verveux, c’était alors le citoyen Besombes, aujourd’hui conseiller municipal du quinzième, un très brave garçon doté d’une extraordinaire et décevante faconde. On le blaguait quelque peu, et à tort. Certains de ses partisans assuraient qu’il unissait l’éloquence de Jaurès à la rigidité doctrinale de Guesde — de quoi écraser l’homme le mieux doué.

Je me souviens qu’un soir j’acceptai de lui faire vis-à-vis dans une conférence contradictoire sur je ne sais plus quel sujet. Besombes parla pendant près de deux heures sur les mines, sur le pétrole, sur la socialisation des moyens de production, sur la tactique du parti… J’avais préparé vaguement mon « topo ». Mais quand il fallut répliquer, j’étais sidéré, anéanti, ébloui peut-être. Je bafouillai lamentablement.

Besombes, bon enfant, très actif, très remuant, avait de nombreux partisans. Alors on imagina une nouvelle tendance : le « besombisme ». Puis un beau jour, à propos d’un incident dont je n’ai pas gardé le souvenir, Léon Daudet, sous la signature : Rivarol, publia dans l’Action Française ce distique :


Aïeux qui reposez dedans les catacombes,
Que pensez-vous du cas du citoyen Besombes ?


Ce fut un vrai succès. Mais ce que Léon Daudet n’a jamais su, certainement, c’est qu’il eut de nombreux imitateurs. Dans les bureaux de l’Humanité et de la Guerre Sociale, c’était à qui fabriquerait des distiques dans le même goût. On les affichait sur les murs :

O vous qui soutenez la politique à Combes,
Prenez garde au courroux du citoyen Besombes !