Page:Méric - À travers la jungle politique et littéraire, 2e série, 1931.djvu/47

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article fougueux que Zo d’Axa avait écrit contre ce genre de sport. Darien récolta un coup d’épée, je crois, ce qui ne l’empêcha nullement de continuer sa collaboration au journal.

Mais ce qui le projeta en plein ciel de la notoriété fut son volume, moitié roman, moitié autobiographie : Biribi.

C’était un livre féroce et courageux. Darien, fort mauvaise tête à la caserne, avait fini son temps en Afrique, aux compagnies de discipline. Il en rapporta un réquisitoire de trois cents pages qui fit sensation, eut son écho au Parlement et dans le pays.

Depuis, on a écrit beaucoup sur Biribi, — je signale, entre autres, les études du regretté Dubois-Desaulle : Sous la Casaque, Cocos, Camisards et Peaux de lapin, etc. — mais le livre de Darien avait le mérite d’être le premier.

Nul, d’ailleurs, ne l’a égalé en violence. L’écrivain y signalait les joyeux supplices auxquels on soumettait des hommes coupables, pour la plupart, de peccadilles et d’entorses à la discipline, — cette force principale des armées. Il y disait les silos où des malheureux agonisent dans la vermine, les diverses variétés de crapaudines, les tombeaux, les bâillons et aussi la lâche cruauté des chaouchs, monstres à face humaine, inquisiteurs en uniforme, qu’aucune surveillance, aucun contrôle ne venaient contrarier dans leurs exercices sauvages.

Il y disait comment ces messieurs les sergents de Biribi, désireux d’aller faire un peu la noce au chef-lieu, s’avisaient de jeter au conseil de guerre quelque malheureux disciplinaire. Car le conseil de guerre les appelait comme témoins et accusateurs.

Alors, les bourreaux jouaient aux cartes la vie et la liberté d’un pauvre diable. Celui qui avait gagné tenait