Page:Méric - À travers la jungle politique littéraire, 1930.djvu/180

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la tête du candidat au milieu d’une paire d’ailes noires. Au-dessus, ce titre en lettres grasses : « Le candidat chauve-souris ». Et sur les ailes, d’un côté : « Je suis radical, voyez mes ailes ! » De l’autre : « Je suis nationaliste, vivent les rats ! »

Cette affiche fit plus pour la défaite de M. Montillot que toutes les déclamations et tous les placards. Mais notre adversaire se fâcha. Il riposta en s’en prenant… à qui ?… à moi-même. Une nouvelle affiche surgit un matin qui s’intitulait : « La Chauve-Souris au Rat d’Égout ». Le « rat d’égout », c’était votre serviteur.

Nous possédions aussi, pour notre joie, un autre concurrent, le citoyen Lemonnier. Imaginez un grand corps maigre avec la tête de feu Déroulède ou de Don Quichotte. Que représentait-il, ce brave homme dont les bredouillements à la tribune déchaînaient le rire ? Il ne le savait pas exactement. Tantôt il se déclarait prêt à faire la révolution ; tantôt il se rangeait du côté des défenseurs de l’ordre. Mais il eut la fâcheuse inspiration d’écrire, dans je ne sais plus quelle feuille, que j’arrivais, chaque soir, à la porte des préaux d’écoles, dans une somptueuse limousine. Ah ! le malheureux ! Tout le quartier savait que j’habitais à deux pas des salles de réunion. L’infortuné Lemonnier, houspillé, menacé, dut s’excuser publiquement.

Seulement, nous avions déjà le « candidat Chauve-Souris ». Nous eûmes le candidat « Limousine ». Et ça devenait de plus en plus rigolo. On lisait un peu partout : « Montillot-Chauve-Souris… candidat