Page:Méric - À travers la jungle politique littéraire, 1930.djvu/71

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localisée dangereusement, nécessitait des soins spéciaux et l’emploi des rayons X. Son sursis achevé, il dut néanmoins faire comme les autres et se constituer prisonnier.

Dans les débuts, cela marcha à peu près. Delannoy, naturellement, était privé des soins que réclamait son état. Le mal empira. Bientôt, nous comprîmes que notre compagnon souffrait atrocement, au moral surtout (il était marié et père de famille). La nuit, on l’entendait s’agiter dans sa cellule, incapable qu’il était de trouver le sommeil. Peu à peu, il s’affaiblissait, s’éteignait. Et rien à faire à la Santé. Le médecin consulté déclarait à ce pauvre Delannoy :

— Quand on est malade comme vous l’êtes, on ne se fait pas mettre en prison.

Un soir, nous nous réunîmes à quelques-uns dans une cellule et il fut décidé que nous tenterions une démarche. Une délégation fut désignée. Elle se composait d’André Gaucher et de moi-même.

Le directeur prévenu nous reçut le lendemain matin, dans son cabinet. Et, immédiatement, Gaucher cédant à son tempérament, se mit à cogner violemment sur la table et à se répandre en menaces. Je l’entends encore :

— Monsieur, c’est un assassinat ! Vous me comprenez. On est en train d’assassiner un homme ici, dans votre maison. Et c’est vous que nous rendons responsable.

Le directeur, ahuri, tremblant, regardait vers la porte, prêt à appeler. Et il balbutiait :

— Messieurs, messieurs… je vous en prie.